Mathias, il est architecte de forêts.
Non, en vrai il est bûcheron, mais il fait ça bien. Il observe, il se questionne, il coupe, il observe encore. Il passe, et puis il repasse, l’hiver suivant, et l’autre encore. Il gère des forêts de moins de 5 hectares pour pouvoir être à la fois celui qui tient le crayon et celui qui tient la tronçonneuse. Il marque, il coupe – il jure et s’exclame – il ébranche – on dirait qu’il danse – il tracte avec son treuil – une grosse corde avec une télécommande – il débite ou fend ou façonne et finalement trouve un acheteur.
Depuis qu’il a commencé à manier la tronçonneuse, il est fidèle à ses forêts. Il veut pouvoir les voir changer. Voir comment, avec la lumière qu’il leur a donnée, les arbres vont se dessiner.
Mais sur Mathias, je n’en dessine pas plus, parce qu’il le fait très bien lui-même.
Je n’ai passé qu’une journée en forêt avec Mathias, le treuil, la tronçonneuse, le merlin et les coins. Mais c’est une journée qui m’a occupé les pédales pendant toute la traversée jusqu’en Ardèche... Est-ce qu’il ne tient pas là un bel équilibre ? Entre travail intellectuel et manuel ; entre forêt et bois ; entre travail hivernal et temps à la belle saison ; entre ancrage dans un territoire et mobilité estivale ; entre travail solitaire et lien à tous ceux qui font la chaîne du bois, en commençant par les propriétaires ; entre autonomie et relation.