Les enfants des bois, jouer, jouer encore

Les enfants des bois se retrouvent chaque mercredi dans la vallée de la Drôme (26), accompagnés par l’association Dryade. Le temps d’un jour, ils sont libres (d’apprendre) en jouant. Partage.

Dans la vallée de la Drôme

Pascale Laussel habite sur une colline du Crestois. J’y suis arrivée de nuit, après avoir remonté doucement l’ample vallée de la Drôme. Les reliefs ardéchois sont déjà loin. L’horizon s’ouvre. Sous la lune, je crois regarder la mer.

Vallée de la Drôme la nuit, copindesbois

Vallée de la Drôme, forêt de Saou, dessin, copindesbois

Le jour, la lumière se pose sur les falaises du Vercors et le massif de Saou, étrange synclinal perché. À leurs pieds, des champs, des bois. Dedans, des enfants.

Ils sont libres (d’apprendre) en jouant.

Chaque mercredi, Pascale accompagne une quinzaine d’enfants dans un bois de Chabrillan. Le temps d’un jour, ils sont libres (d’apprendre) en jouant. Libres de se faire quelques bobos, libres de se défouler dans le mouvement, si l’énergie leur en dit. Libre aussi leur imagination de galoper avec tout ce que la forêt leur raconte. Chaque semaine, froid, vent, chaleur ou pluie, ils entrent un peu plus en connivence avec ce bois qui les accueille.

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Une journée avec les enfants des bois de Chabrillan

10h. Un jeune bois, enraciné dans son talus, juste en face du village perché. Des chênes, des acacias, des peupliers. Des ormes ornés de leur graphiose, beauté fatale. Des grandes perches pas bien droites, presque toutes habillées de lierre. Elles grincent dans le vent. Toutes les feuilles sont au sol. Quelques arbres aussi.

Emmanuelle est déjà là, assise un peu plus haut, tous les sens en alerte. Les percussions d’un pic nous accueillent, Pascale, Éric, Gabin-son-gamin et moi. On prend le temps d’atterrir, « entre adultes ».

11h. Les premières voix d’enfants montent dans le bois. Les premiers jeux, naturellement. Surfer sur un bout de bois ; écorcer un arbre mort ; décortiquer les bourgeons d’une branche tombée au sol ; suivre les traces d’un sanglier ; jouer de la musique avec un bâton, s’en servir comme troisième jambe, comme mitraillette, pour prendre la parole. Le lierre affaissé devient cachette. Les formes étranges et les traces inconnues prennent vie, tout un bestiaire à invoquer. Et Mani le chien qui revient, éternellement, son bâton dans la gueule. Pour jouer, encore. À quel moment a-t-on oublié que l’on apprend en jouant ?

14h. Le ventre est plein d’un casse-croûte sur les souches. D’autres enfants se joignent à nous : d’autres joueurs à accueillir, au sein d’un cercle où l’on n’oublie pas de remercier ce et ceux qui nous font du bien. D’autres joueurs pour apprendre à faire groupe, à trouver sa place et à la réinventer. À être social. « Enfants des bois » ? Oui mais ensemble !

16h. Éric, 41 ans, est perché entre deux troncs. Drôle d’oiseau. Emmanuelle, 35 ans, est penchée sur les traces d’un sanglier. Pascale, 43 ans, ficelle une bâche entre cinq troncs pour abriter de la pluie. Hélène, 24 ans, délivre furtivement trois enfants attrapés par le cache-cache. À quel moment a-t-on oublié de jouer, nous, « adultes » ? À quel moment a-t-on oublié d’être enfants ?

17h. Ce sont des boules d’énergie – de la bonne – qui redescendent vers leurs parents, et un bout de bois dans la main et un bout du bois dans la tête.

La mise en place d’un jeu grandeur nature

Après s’être beaucoup impliquée dans le Réseau pour les Alternatives Forestières, Pascale s’ouvre à d’autres relations à la forêt. Avec le regard doux d’une gestionnaire, elle a appris à faire en forêt. Aujourd’hui, elle y ajoute une autre présence, en explorant l’être en forêt.

Les enfants des bois, création du projet, association Dryad, Drôme

Le site internet de l’association Dryade

Un livre. Les enfants des bois, Sarah Wauquiez (2008)

Un film. L’autre connexion, une école dans la nature sauvage, Cécile Faulhaber (2018)

Le Réseau Français de Pédagogie par la Nature