Les Hauts de Villaroger, ce sont plus de mille hectares de haute montagne, en Savoie, mis en réserve naturelle depuis trente ans. Même si le terme de « réserve » peut évoquer une mise sous cloche totale, les aires protégées ne sont pas pour autant figées. Certes, elles bénéficient d’une réglementation qui vise avant tout une protection efficace des milieux naturels et des espèces associées. Mais une Réserve naturelle c’est aussi un outil de projet, pour permettre une gestion adaptée de ces morceaux de paysage, en évolution constante.
Le plan de gestion est le document qui planifie l’ensemble des actions à mettre en œuvre pour conserver et valoriser le patrimoine naturel de la Réserve. Pour la période 2022 – 2031, ce sont plus de 80 actions qui sont prévues et détaillées dans un document officiel. L’Office national des Forêts, gestionnaire de la Réserve, m’a passé commande pour écrire, illustrer et mettre en forme l’essentiel de ce document. Extraits.
Les roches
Falaises, éboulis, moraines, névés, glaciers. Bienvenue en très haute altitude, là où la neige et les roches dominent. Loin des activités humaines, on pourrait croire les neiges éternelles et ce caillou immobile. Pourtant tout est en mouvement ici.
La température moyenne annuelle a augmenté de 2°C en Savoie depuis 1950, ce qui en fait une des zones les plus réchauffées à travers le monde. Résultat, les glaciers de Turia et du Grand Col reculent inexorablement. La glace qui maintenait la cohésion de certaines parois rocheuses libère en fondant des blocs rocheux et de vastes volumes de moraines. Le lac de Riondaz en a fait les frais : il a été complètement comblé entre 2019 et 2022 par d’importants apports sédimentaires. Les impacts du changement climatique se font aussi sentir un peu plus bas en altitude : à 1500 m, la quantité de neige a diminué de 30% depuis 1980. Ces changements d’ampleur bouleversent les cortèges d’espèces adaptées aux conditions de vie particulières de la haute montagne.
Les forêts
Quel fouillis ! Il y a du bois mort partout ici. Les coléoptères et les champignons s’en donnent à cœur joie, pour le plus grand plaisir des pics qui s’en nourrissent. Il reste de ce festin quelques trous où s’abritent des oiseaux cavicoles comme la chevêchette d’Europe ou la nyctale de Tengmalm.
La trame de vieux bois et de bois mort est remarquable sur la réserve. On y a même trouvé une espèce de coléoptère relictuelle des forêts primaires. Plus de 500 espèces de champignons ont été dénombrées, dont près de la moitié sont des champignons ectomycorhiziens (ie. en symbiose avec les racines des arbres). Cette belle diversité pourrait expliquer le dynamisme des essences forestières sur les Hauts de Villaroger malgré le sol acide et le climat montagnard.
Les pelouses et les landes
La fréquentation
À l’heure où les enjeux environnementaux et climatiques imprègnent la vie de tout le monde, il est capital que la protection rime avec une pédagogie active.
La poudreuse vole derrière le passage des skieurs. La monitrice qui les accom- pagne leur décrypte le paysage, pour voir sous les nuances de blanc. Là-bas, dans la Combe interdite, plusieurs tétras se sont creusés des igloos pour passer l’hiver. Ils n’en sortent que pour mastiquer quelques bourgeons et aiguilles de résineux, au plus proche. Pour peu qu’un skieur s’approche par inadvertance, le voilà qui s’envole en grillant quelques précieux calories, et s’envole avec lui ses chances de passer l’hiver…
Ici, quiétude est le maître mot.
L’ensemble du document en format PDF – essentiel_RN-Hauts-de-Villaroger.pdf
Le site internet du Parc naturel régional des Pyrénées Ariégeoises – villaroger.fr/reserve-des-hauts-de-villaroger
Les illustrations ont été réalisées sur la commande de l’Office National des Forêts : merci de demander l’autorisation si vous souhaitez les utiliser.